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Rome, son Panthéon, sa basilique Saint-Pierre, sa place Navonne, sa chapelle Sixtine… et ses curiosités macabres. Petit détour par un lieu insolite de la capitale italienne, le cimetière des capucins.

Cimetière capucin, Santa Maria della Concezione, Rome (photo ministère de l'Intérieur)

Cimetière capucin, Santa Maria della Concezione, Rome (photo ministère de l’Intérieur)

A deux pas de la fontaine de Trévi, sous l’église Santa Maria della Concezione, se cache un lieu étrange, le cimetière des capucins. Au dessus de l’entrée qui mène à la crypte, une inscription annonce la couleur :

« Nous avons été ce que vous êtes, vous serez ce que nous sommes. »

En passant la porte, on pénètre dans un couloir d’une quarantaine de mètres de long, qui dessert cinq chapelles. Il s’agit de l’ossuaire du monastère des capucins : y sont ici déposés les tibias, crânes et bassins de quelques quatre mille moines décédés entre 1528 et 1870.

En 1631, les moines capucins s’installent en l’église Santa Maria della Concezione. En quittant leur ancien monastère, ils emportent avec eux le contenu de leur ossuaire, c’est-à-dire les restes des membres de leur communauté, qu’ils déposent dans la crypte de leur nouvelle église, non sans un certain souci artistique.

Pendant  deux siècles et demi, la crypte est pour les moines un lieu de prière et de méditation. Suite à une ordonnance papale, ceux qui la visitent un premier dimanche d’octobre se voient accorder l’indulgence plénière. En 1870, les pratiques funéraires évoluant, le développement de la crypte est stoppé et plus aucun os ne l’intègre.

Cimetière capucin, Santa Maria della Concezione, Rome (photo ministère de l'Intérieur)

Cimetière capucin, Santa Maria della Concezione, Rome (photo ministère de l’Intérieur)

Aujourd’hui, le lieu est devenu une attraction touristique insolite. Malheureusement, il se visite trop souvent comme une curiosité macabre à la manière d’un manège fantôme de fête foraine, sans aucune action de médiation. Il serait pourtant souhaitable de délivrer lors de la visite des explications pour aider le visiteur à remettre ce lieu dans son contexte, à savoir d’une part qu’il s’agissait d’un espace de méditation et d’autre part que les ossuaires sont quelques choses de relativement répandus. En effet, dès le Moyen-âge, en raison de l’encombrement rapide des cimetières, alors situés en ville, il faut régulièrement retirer les ossements pour pouvoir enterrer de nouveaux corps. Les restes sont alors entreposés dans des espaces spécifiques, appelés ossuaires. A Rouen, l’ancien ossuaire, l’aître saint Maclou abrite aujourd’hui une école d’art. A Paris, les anciennes carrières sont transformées en ossuaires municipaux  à la fin du XVIIIe siècle (ce qu’on appelle les catacombes). Les galeries recueillent alors les restes du cimetière des Innocents, dont la fermeture a été ordonnée pour des raisons sanitaires. Cependant, les lieux qui, comme le cimetière des Capucins, présentent une telle mise en scène macabre sont rares. On cite souvent le célèbre ossuaire de Sedlec à Kutnà Hora, en République Tchèque, qui rassemble les restes de 40 000 défunts et dont la mise en scène, encore plus extraordinaire qu’à Rome, date du XVIIIe siècle. On m’a enfin récemment signalé le cimetière des capucins de Palerme, également très impressionnant.